Dictionnaire du Moyen Français (1330-1500)

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     COMMUN     
FEW II-2 communis
COMMUN, adj. et subst. masc.
[AND : commun1 ; DÉCT : comun ]

I. -

Adj. "Commun"

A. -

"Propre à deux ou plusieurs personnes" : Mes chiers amis, Puis qu'Amours ad ce nous a mis Que nos deus cuers ensamble joindre Vuet sans partir et sans desjoindre, Et que faire vuet un de deus, Pour Dieu, ne faisons paire d'euls. Car il sont perdu et honni, Se si pareil et si onni Ne sont qu'en bien et mal commun Soient, et en tous cas comme un, Sans pensée avoir de maistrie, De haussage ou de signourie. (MACH., R. Fort., c.1341, 148).

B. -

"Qui se fait ensemble, à plusieurs" : Lors de commun acort recordent Qu'elle est digne d'estre loée. (MACH., D. Aler., a.1349, 351). Juges sui par commun acort Especiaument d'un descort Qui est ci entre deus parties, Pour atendre droit de parties. (MACH., J. R. Nav., 1349, 192). Si s'avisierent d'un malice Pour li oster de son office Et pour sa mort, que sans deloy Il le penroient en sa loy, Si que d'assentement commun Tuit furent en acort comme un (...) D'un edit faire et un decret, Tout en appert, non en secret (MACH., C. ami, 1357, 36). Lors d'un commun assentement Respondirent moult liement, Qu'il le feroient ; et le firent Mieus encore qu'il ne leur deirent. (MACH., P. Alex., p.1369, 54). N'autre chose n'i va querir Fors au Saint Pere requerir Qu'il ottrie un commun passage, Car faire vuet le saint voiage. (MACH., P. Alex., p.1369, 219).

C. -

"Relatif, propre à tous, au plus grand nombre" : Je te pri que tu te conseilles A bonnes gens et que tu veilles A faire le commun pourfit, Einsi com Boësses le fit Et com maint philosophe firent Qui mainte doleur en souffrirent Et furent chacié en essil. (MACH., C. ami, 1357, 133). ...Et que c'est grant confusion, Et que Dieu courresce et offent Quant son service li deffent, Car à saoul et à geun Son digne service est commun, En tous cas, à tous et à toutes (MACH., P. Alex., p.1369, 226). Et vous leur avez respondu que vous ne voliés que je y alasse, et que eu cas que je yroie, vous me feriés faire damage et deshonnour ; de la quele chose certes vous me faisiés grant tort, car le service de Dieu est commun et vous ne le deussiez mie deffendre à nul crestien, especiaument à moy, considéré le service que je vous ay fait. (MACH., P. Alex., p.1369, 229).

D. -

"Ordinaire, courant, habituel ; fréquent, répandu" : Et de ce la vient la tempeste Qui destruit le monde et tempeste, Les merveilles et les fortunes Qui au jour d'ui sont si communes Qu'on n'oit de nulle part nouvelle Qui soit aggreable ne belle (MACH., J. R. Nav., 1349, 140). Car ce fu chose assez commune Qu'on vit le soleil et la lune, Les estoiles, le ciel, la terre, En signefiance de guerre, De doleurs et de pestilences, Faire signes et demoustrances. (MACH., J. R. Nav., 1349, 142). ...Et au temple donna preu dons ; Le ciel, le soleil et la lune Cultiva - c'est chose commune - Et toute la chevalerie Dou ciel, et pour l'idolatrie Plus essaucier, en certein lieu Les fist mettre eu temple de Dieu. (MACH., C. ami, 1357, 50).

 

-

Estre commun de. "Avoir pour habitude de" : ...Fortune, Qui de mentir a tous est trop commune. (MACH., J. R. Beh., c.1340, 68). Ay ! Fortune, Qui es forte une, Preste et commune De baillier prune Verte ou meüre, quant tu veulz (MACH., Lays, 1377, 476).

 

-

Chose est commune. "C'est bien connu" : Chose est commune, Car quant la personne est plus pleinne D'onneur, de richesse mondeinne, De son tour a niant la meinne. (MACH., R. Fort., c.1341, 35). Car on voit - et chose est commune - Que qui plus en a, plus en pert. (MACH., R. Fort., c.1341, 90).

 

-

Selonc la maniere commune. "Selon l'usage, d'une manière conforme aux usages" : Pour ce penre congié convint ; Si le prist chascuns et chascune Selonc la maniere commune. (MACH., R. Fort., c.1341, 147).

E. -

La gent commune. "Le peuple, le vulgaire" : Quant il furent tuit arrivé, N'i ot estrange ne privé Qui en son cuer ne se resjoie, Et qui ne meinne feste et joie, Quant il ont passé tel fortune ; Aussi toute la gent commune Dou païs grant feste en feïrent. De leurs galées descendirent Et aus hostelx se hesbergierent ; à grant joie se desarmerent. (MACH., P. Alex., p.1369, 110).

II. -

Subst. masc.

A. -

"Peuple, population" : Ce fist li roys à leur priere, Car d'amour certeinne et entiere Le commun de Venise amoit Et ses bons amis les clamoit. (MACH., P. Alex., p.1369, 119).

 

-

[P. oppos. à gens d'armes] : Et s'estoient XXX. contre un De gens d'armes et de commun, Li Sarrazin, que Dieus confonde ! De pierre d'engin ou de fonde. (MACH., P. Alex., p.1369, 157).

B. -

Le commun. "L'ensemble des gens, tout le monde" : "...Se le roy laissons couvenir, Il nous menra à tel pertuis Que nous en serons tous destruis, Car il sont bien mille contre un." Einsi murmuroit le commun. (MACH., P. Alex., p.1369, 80). Encor y avoit autre cause Dont leur joie vient et se cause. Li communs la pais desiroit Tant que nuls ne le vous diroit, Et on disoit communement Par tout et veritablement Que la pais estoit confermée Dou roy de Chypre et acordée... (MACH., P. Alex., p.1369, 189).

C. -

"Petit peuple" : Las ! or seray en l'Empire en essil, Car je voy bien qu'estre convient comme un Prestres et lais, et en main de commun. (MACH., Compl., 1340-1377, 252).
 

Guillaume de Machaut Noël Musso


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